Vers un nouvel ordre monétaire ? La BRI, les CBDC et la métamorphose de la monnaie

L’argent, tel que nous le connaissions depuis des siècles, est en train de changer de nature. Il ne s’agit plus seulement d’un outil arithmétique permettant d’additionner, soustraire, multiplier ou diviser. Il devient progressivement un objet programmable, intégrant des logiques conditionnelles, des restrictions d’usage, voire une date de péremption. Ce basculement ne relève pas de la science-fiction. Il est déjà à l’œuvre, dans les laboratoires discrets des banques centrales, sous la houlette d’une institution peu connue du grand public : la Banque des Règlements Internationaux (BRI), basée à Bâle.

La BRI : chef d’orchestre silencieux d’une révolution monétaire

Souvent présentée comme la “banque centrale des banques centrales”, la BRI regroupe une soixantaine d’institutions monétaires qui représentent plus de 95 % du PIB mondial. Depuis plusieurs années, elle pousse activement les banques centrales à développer des CBDC (monnaies numériques de banque centrale), aussi bien pour les usages interbancaires que pour le grand public (“retail CBDC”).

Les projets mBridge, Icebreaker ou encore l’intégration du XRP Ledger dans certains tests pilotes de l’euro numérique montrent que les technologies issues du monde crypto ne sont plus marginales. Elles sont en train d’être absorbées, adaptées et contrôlées pour servir une nouvelle architecture financière.

Le discours officiel : insistance suspecte sur la “non-programmabilité”

Il est frappant de constater à quel point les rapports officiels de la BCE insistent – parfois jusqu’à la répétition excessive – sur le fait que l’euro numérique “ne sera pas programmable“. Cette répétition interpelle : lorsqu’on éprouve le besoin de rassurer aussi lourdement, c’est souvent que l’idée fait son chemin en interne. L’existence technique de la programmabilité est une réalité, et ses applications sont nombreuses : aides ciblées, incitations à consommer, limites d’usage, taux d’intérêt différenciés.

Une transformation de la monnaie en profondeur

Ce que nous observons, c’est une transformation ontologique de la monnaie. Loin de rester un instrument neutre, elle devient un outil de politique publique dynamique, capable de réagir en temps réel, de s’adapter à un individu ou à une conjoncture. Une telle mutation soulève des questions majeures :

  • Quid de la liberté économique individuelle ?
  • Comment garantir l’anonymat des transactions ?
  • Quelles démocraties monétaires dans un monde de monnaie automatisée ?

Conclusion : entre promesses techniques et défis éthiques

Les cryptoactifs ont ouvert la voie à une innovation fulgurante. Les banques centrales, guidées par la BRI, sont en train de reprendre la main sur ce changement en intégrant ces outils dans une logique de contrôle. Ce n’est pas nécessairement une mauvaise chose, mais il faut le dire clairement :

Nous entrons dans une ère où l’argent ne sera plus un simple chiffre sur un compte, mais un code, un contrat, une condition.

Et cela change tout.

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